mercredi 28 octobre 2015

Mon "Romazava"

Le romazava est un plat typique malgache, un plat des pauvres dont c'est entiché la bourgeoisie pour marquer leur malgacheité. Comme la bouillabaisse à son origine (restes de poissons non vendus par les pêcheurs des calanques où on trempe des tranches de pain rassis) , le romazava est un plat des pauvres, un bouillon de fin de mois, celui qu'on concocte quand on n'a plus un sous dans la maison. Alors pourquoi faire un romazava avec trois viandes ? Quelle idée d'acheter des brèdes* nobles pour le cuisiner ? Les mœurs ont changé car celui de mon enfance sont composés des brèdes sauvages ramassées dans le jardin (anatsinahy**, anamamy***, rambomanga****, ...). Ici, c'est du gâchis d'y mettre des beaux morceaux de bœuf. Une hérésie d'y ajouter de la viande de porc. Du gaspillage d'y plonger des crevettes alors qu'une petite poignée de patsa (petit poisson séché) suffit largement pour embaumer ce plat maison qu'on cuisine quand la bourse est vide.
D'ailleurs, Le romazava, veut dire, bouillon clair, et on le sert rarement dans les petites gargotes où on accompagne plutôt le riz et la viande avec le romatsatso (bouillon fade).
Les temps ont changé, le romazava est rentré dans les classiques de la grande cuisine malgache et de la cuisine de l'océan indien jusqu'à l'île de la Réunion importé par les marrons. Le romazava s'est enrichi, il s'est invité dans les tables des vazahas, fier d'être servi à la fourchette. Il reste encore son cousin germain le "vary amin'anana" (soupe de riz avec les brèdes), fidèle à son origine et qui n'a pas pris encore la grosse tête mais jusqu'à quand ?

*brèdes: feuilles comestibles du portuguais bredo
** brèdes du bon Henri
*** brèdes morelles
**** feuilles de patate douce

Vatolahy, Antsirabe, oct 2015

mardi 27 octobre 2015

Que dire des vins malagasy ?


Que dire des vins malgaches ? Difficile d'y répondre tant qu'on n'a pas fait un tour; même si le circuit est vite fait (en nombre de maison mais pas en km) dans les hautes terres de la région du Betsileo entre Ambalavao et Fianarantsoa. Entre le rouge, le blanc, le liquoreux, on a opté cette fois ci pour le petit gris : couleur paille, court en bouche, minéral et terreux. Un vin de terre où l'âme de nos ancêtres s'est diluée pour donner corps, dans ce breuvage, à la couleur aurifière. Les gestes des deux serveuses sont tellement précieux pour nous servir que l'on a l'impression d'une répétition de la sainte eucharistie. Après avoir trempé soigneusement nos lèvres dans les verres, l'une des serveuses a déposé délicatement la serviette blanche sur la bouteille, pendant que l'autre a ramassé délicatement les restes de bouchon sur la table. Après avoir levé nos verres à la lumière, le corps du foie gras chaudement poêlé fond dans nos bouches sans rompre. Le vin coule lentement dans nos veines. Le cérémonial est parfait. Les bougies restent allumer. Le tonnerre gronde au loin. La messe est dite.

Andraikiba, ville d'Antsirabe, oct. 2015

dimanche 18 octobre 2015

Chez PaPy râleur

Quand on arrive au fin fond d'un village à 9h du soir à Madagascar où le délestage est le lot quotidien de chaque foyer y compris les restaurateurs et que sur la carte on découvre : cervelle façon meunière, steak tartare de zébu et ses pommes frites, ..., ou ici carpaccio de mérou au trois poivres de Madagascar, on doute un peu de la fraîcheur de ce qu'on a dans l'assiette: fausse idée. Même si le zébu a fait quelques kilomètres avant d'atterrir dans l'assiette et que la cervelle est passée de main en main avant de mousser dans son beurre et même si le mérou est pêché du matin sous le soleil écrasant des Tropiques : il fallait ne pas rompre la sacrée sainte chaîne du froid. Ici chez "Papy râleur" on a appris à jongler avec toutes les difficultés et à fournir dans la règle de l'art, du bon et du beau repas français. À table, le bonheur est palpable, les langues se délient, le petit rosé chilien rafraîchit nos gorges, je déguste mon carpaccio avec du pain chaud.

Chez "papy râleur", amborovy , oct 2015

lundi 12 octobre 2015

Un bol renversé ou rien ... à Tana

Tana n'est jamais à la traîne pour toutes les modes y compris celle de la cuisine. Très en vogue ici en ce moment "le bol renversé", et chaque restaurant s'ingénie à créer son style : du riz blanc au riz sauté mais toujours avec l'incontournable "œuf sur le plat", qu'on aime bien quand c'est un peu grillé. Venue directement de l'Asie dans notre assiette cette présentation originale du riz et sa viande est devenue très populaire.
Quand je suis arrivé en France dans les années 80, je n'ai jamais compris l'opération "bol de riz" pour l'Afrique. J'ai dit à mes camarades de classes qu'il vaut mieux "un bol de pâte ou autre" car le riz on en a marre chez nous. Trente après, le bol de riz est bien arrivé ici mais pas celui de l'Occident et de ses œuvres caritatives mais celui de l'Asie et sa culture. La terre tourne et la culture continue de se mélanger. Le bol est bien renversé, mais est ce du bon coté ?

Vonjy, Piment café , Antananarivo

mercredi 26 août 2015

Voyage immobile

Cet été, après une semaine de voyage au cœur des chorégies d'Orange (merci Francois !), pour percer les secrets d'une Carmencita "made in France",  à côté d' un Don José époustouflant (son salaire aussi), incarné par Jonas Kaufmann, je me suis mis au frais,  chez moi, au service de garde de sept félins et de trois voitures sans leurs maîtres(se)s.

Alors, je me suis fait plaisir de cuisiner ma brède préférée, l'amarante (ou anapatsa en malgache ) à la grecque (servie tiède avec de la fêta, un filet d'huile d'olive extra vierge de Baume de Venise et du citron). 

J'ai été gâté, à la campagne, par la tarte fine aux pêches et abricots de mon amie Claudine, lors d'un après midi bien arrosé au Champagne. 

Le vrai gâteau Basque, du mahorais Marc et de son ami Etchebarne, m'a immergé dans le doux climat bien tempéré du Sud-ouest. 

Le Saint-Nectaire aux goûts fleuris des herbes, de mes deux amis randonneurs Seb & Rija, m'a plongé au fin fond des volcans d'Auvergne.

Le fameux Lonzo à la saveur douce et noisettée, vol direct Ajaccio - Nantes, dans la valise de mon ange gardien angevine, Marie-Odile, m'a fait voyagé en plein maquis Corse. 

J'ai été gâté de vos fruits de voyage, "voandalana" en malgache. Avec vous, cet été mon "Voyages à Nantes",  était un tour de France dans l'assiette, un voyage immobile. Merci ! Misaotra !

samedi 16 mai 2015

"tirami sù " ou tire-moi vers le haut

S’il y a un dessert assez mythique dont on ne sait pas trop l’origine bien qu’il soit italien, c’est le fameux « tiramisu », un des grands classiques gâteaux sans cuisson qu’on pourra réaliser sans four ( quand on est «pauvre» étudiant coincé dans une chambre de bonne) pour épater sa future belle-famille ! Il mérite bien son nom puis qu'en italien, « tirami sù » veut dire littéralement « tire-moi vers le haut », un message subliminale pour faire passer en douceur à son hôte prestigieux notre appel pour sortir de notre condition miséreuse, un message social à appliquer à nos dirigeants. Demain, je fais goûter à mon patron mon tiramisu. A la fin du mois, j’aurais peut-être une augmentation. Génial, non ? Dolce Sublime !!!

Ici deux dégustation de variante de Tiramisù e burro salato caramello e gocce di cioccolato e un altro con fichi canditi.

Gênes, Italie

vendredi 15 mai 2015

Là où il y a "Gênes", il a du plaisir ...

Goûter à des fritures de poissons quand on est au bord de mer est un bon test pour savoir la fraicheur de la pêche. A Gênes, après un plongeon dans le plus grand aquarium d'Europe et en extra quelques batraciens malgaches, j’ai été tenté par un cornet de poissons (calamars, poulpes, petits poissons) ! Excellent et en prime des frites-chips fait maison. Un vrai régal tant la panure est fine et légère. En les dégustant, je me retrouve sur la route de Foulpointe sur la RN5 Km45, avec les beignets de crevettes que seules mes soeurs compatriotes Betsimisaraka savent bien faire, croustillantes et légères et qu’on en perd pas une seule miette (la carapace y comprise).  Voilà donc le saut improbable mais tellement savoureux que j’ai fait dans ma tête: du pays où est né Christoph Colomb à la re-découverte de la cuisine de mon enfance.
Gênes, Italie

lundi 2 mars 2015

Etre ou ne pas être Charlie, là est donc la question ?

Voilà quelques mois que je me pose la question :  Qu’est devenu cet élan de spontanéité  dans le monde entier ?  Existe-t-il une valeur universelle à un instant  T  qui pourra réunir l’humanité ?  
Le dimanche de grande marche,  je suis entré à midi dans un restaurant Kebab pour commander  un sandwich  et  quelle agréable surprise lorsque le patron nous a invités à partager avec lui des huîtres et nous a servi du vin blanc !  Ce geste a fait tomber dans ma tête le fantasme d’une communauté musulmane imaginaire qui considère   : 
- le terrorisme comme « l’expression exacerbée d’un "vrai" islam qui se ramènerait en fait au refus de l’autre en pratiquant un djihad conquérant » ou,
-  qu’il existe un autre  Islam dit des Lumières, progressiste, qui incarnerait « "une religion de paix et de tolérance".  
Je pense qu’il n’y a pas de communauté musulmane, mais une population musulmane. Comme l'histoire le montre,  Il n’y a pas de choc de civilisation mais seulement des civilisations qui se rencontrent, qui s'influencent et qui s'inter-fécondent. Ce simple constat serait un bon antidote contre l’hystérie présente et à venir qui ne fait que commencer. 
Car tous les jours au boulot ou dans mon quartier ou dans la rue, je vis en harmonie avec Hassan, Reda, Sona, Isaac, Fayal, Dimitri, Pedro,  ...,  une grande majorité de population citoyenne, responsable dont en parle très peu. Il n’y a pas de communauté à stigmatiser juste un peuple qui dans sa grande majorité vit en paix avec ces concitoyens. Kebab, Huîtres, Frites et Vin blanc : je suis un peu, beaucoup, passionnément Charlie qui rêve juste d'être un citoyen du monde.